L'IA, le Créatif et le Stratège en 2023

La notion de créativité est un sujet qui pourrait difficilement être plus central et inséparable de notre humanité. Dans tous les domaines d’activités de l'homme, art et science confondus, le progrès semble être rythmé par la cadence de notre capacité à réinventer et à dépasser les schémas de pensée existants et à en créer de nouveaux.

Creativity in the era of artificial intelligence, Philippe Esling, Ninon Devis, Sorbonne Université.

"Tout le monde est agité."

Cette déclaration la semaine dernière dans le New York Times d'Erik Brynjolfsson, économiste à l'Institute for Human-Centered Artificial Intelligence de Stanford, résume parfaitement les réactions face aux nouveaux outils IA.

Jamais depuis l'iPhone la croyance qu'une nouvelle technologie pourrait changer l'industrie n'a été aussi profonde.

It's really amazing if you look at the IPA data, (they've done studies on how good the client and agency community is at setting objectives in the first place.) And they've got some really quite horrifying data, which shows that if they look at marketers who within their own organization are clear on the objectives for marketing in the short term and in the long term, they find that only about 20% of marketers are actually clear on what their objectives are to begin with.

And then that, of course, translates into briefs to agencies. So agencies report that only about 20% of the time do they get client briefs into their agency with really clear objectives on them. And when you think about it, that's just mental.

La créativité est une forme de résolution de problèmes, et vous ne pouvez pas résoudre un problème que vous n'avez pas compris.

Partageant plusieurs points communs avec le domaine de la stratégie, toutes deux exigent une planification méthodique ainsi que d’envisager chaque problème sous différents angles tout en sortant des sentiers battus.

Les démarches créatives et stratégiques possèdent le même point de départ, soit de poser un diagnostic.  Vous devez d'abord comprendre le défi auquel vous êtes confronté.  Cela commence par l’identification de ce qui est important et de ce qui ne l'est pas.

La première phase de l’influent processus créatif de Wallas (introduit en 1926) s’amorce par la compilation des informations et la compréhension du problème (suivi de l’incubation, l’illumination et finalement de la vérification).

C'est la réponse claire à la question “qu'est-ce qui se passe vraiment ici?”

Martin Reeves, président du Boston Consulting Group et auteur de The Imagination Machine:

Une compétence fondamentale en matière de résolution de problèmes consiste à ne pas se lancer immédiatement dans la recherche de solutions. Mais plutôt de se demander : quel est le problème ? Quelle est la bonne question dans cette situation ?

Et pour ce faire, il faut se poser tout un tas d’autres questions comme : que savons-nous ? Qu’est-ce que nous supposons savoir ? Quelles sont les autres façons de voir cette situation ?

Cassandra Extavour est professeur de biologie du développement et de l'évolution à l'université de Harvard, et elle est chercheuse au prestigieux Howard Hughes Medical Institute. Questionnée sur son processus, elle a répondu:

Définir la question est toujours la chose la plus importante parce que vous ne pouvez pas trouver des façons de tester des hypothèses à moins d’être extrêmement clair sur la question que nous posons.

Nous devons être créatifs pour poser la question et ensuite, nous devons être créatifs pour répondre à cette question.

La stratégie importe plus que jamais  - Seth Godin

Selon l’influent stratège Richard Rumelt, l’outil de diagnostic le plus efficace constitue le RECADRAGE de la situation (reframing).

Selon Rumelt:

Il existe littéralement des centaines d'articles universitaires sur le sujet, mais un cadre est simplement le point de vue d'une personne sur quelque chose. Souvent, les individus ont développé des cadres qui fonctionnent pour eux et pour l'organisation. Le cadre utilisé concentre leur attention sur certaines questions et mesures plutôt que sur d'autres.

Une étape clé du diagnostic consiste à tester, ajuster et changer le cadre, ou point de vue.

Pour Martin Reeves:

Le Framing and reframing sont incroyablement importants.

Au cours de ma carrière, je n’ai jamais vu un seul cas où la nature du problème identifié par le client était le véritable problème. Il s’agissait de la meilleure tentative du client pour formuler le problème.

Souvent, lorsque l'on fait affaire à votre expertise de créatif, vous avez l’avantage de l’outsider car le client a besoin d’aide dans un domaine qui n’est pas tout à fait le vôtre. Vous pouvez poser des questions naïves sans avoir l'air trop bête. Et comme le diagnostic est essentiellement un processus qui consiste à demander "quoi" et "pourquoi" encore et encore, cette situation vous avantage.

Martin Reeves:

Les clients nous disent maintenant : “Nous connaissons ce secteur à fond et votre équipe spécifique au secteur possède les mêmes connaissances. Alors pourriez-vous nous amener quelqu’un qui ne sait rien de nous?

Plus que jamais, votre modèle de réussite est probablement sujet à des perturbations (disruptions); dans ce cas, ce dont vous avez besoin, c’est d’une nouvelle pensée, agnostique de l’industrie, une pensée analogique à des domaines externes.

Le grand expert sur la théorie des réseaux, Albert-László Barabási, raconte cette histoire:

Je me souviens que l'une de mes premières idées est venue quand je complétais mon Doctorat et je l’ai partagée à mon conseiller. Il m'a dit qu’elle n’était pas intéressante. Deux ans plus tard, quelqu'un l'a fait et ça a complètement changé notre domaine.

Depuis, j'ai appris à ne pas écouter les experts. L’erreur de la pensée experte est que tout leur semble évident. Alors ils ne peuvent pas concevoir ce à quoi pourrait se développer une nouvelle idée, parce qu'ils connaissent trop de choses sur la question.

Notre chercheuse d’Harvard, Cassandra Extavour, a un deuxième emploi à temps partiel en tant que soprano professionnelle, chantant de l'opéra et de la musique baroque avec des ensembles professionnels dans le monde entier. Elle trouve excitant de construire un pont entre un domaine et un autre afin d'utiliser des façons de penser ou de regarder un problème de ce domaine pour répondre à des questions dans un autre domaine. “J’y trouve une source de créativité parce que ça m'offre de nouvelles perspectives. C’est ce que je recommande pour pratiquer science et créativité.”

2023 s’annonce comme une année charnière en créativité et résolution de problèmes grâce à la démocratisation des d’outils IA permettant d’avoir accès à l’ultime “Outsider.”

Car si votre expertise constitue une composante essentielle de la créativité, permettant un raisonnement plus efficace basé sur une expérience ainsi que des modèles (frameworks) pertinents, il existera toujours la composante du contexte social, qui dans l’évaluation de solutions peut limiter la créativité humaine. À l’inverse, les approches IA peuvent être libérées de ces biais sociaux.

Voyons comment.

Eric Schwitzgebel, Anna Strasser et Matthew Crosby ont entrepris de découvrir si GPT-3 peut cloner un philosophe: les modèles de langage IA peuvent-ils être formés pour générer des textes philosophiques difficiles à distinguer de ceux produits par des humains ?

Résultat?

Nous avons réussi au-delà de nos attentes.

Nous avons “entraîné” le modèle GPT-3 d’OpenAI avec le texte des blogues d’Eric Schwitzgebel et les œuvres du célèbre philosophe Daniel C. Dennett.

En bref, nous avons créé un modèle de Daniel Dennett suffisamment convaincant pour que les experts dans les travaux de Dennett confondent fréquemment les paragraphes générés par le modèle de langue avec des paragraphes réellement écrits par Dennett.

On pense tout de suite aux risques potentiels. Les auteurs en sont conscients et le soulignent. Mais malgré cet avertissement, ils nous font part d’une conclusion qui a un énorme impact pour la créativité:

Nous voyons un potentiel à long terme considérable pour les modèles de langage entraînés sur le corpus d’un auteur individuel. Si la technologie continue de progresser, les modèles de langage affinés pourraient bientôt produire des résultats (outputs) suffisamment intéressants pour servir de source précieuse de sélection par des experts.

Même si la majorité de ce qui est généré a peu d’intérêt, des données de sortie sélectionnées pourrait avoir un mérite musical ou artistique considérable. Un compositeur ou un artiste pourrait créer de nombreuses sorties, choisir les plus prometteuses, les éditer légèrement et les présenter comme un travail original - une possibilité suggérée par Dennett lui-même lors d’une communication personnelle. Dans de tels cas, le modèle de langage constitue un outil de pensée utilisé par les humains.

Il est loin d'être évident que l’IA qui domine aux échecs aient des croyances sur les échecs. Il est encore moins probable que les modèles de langage des philosophes aient des croyances philosophiques. Mais cet IA peut servir de tremplin vers quelque chose de plus grand. Peut-être sommes-nous sur le point de créer des machines capables de produire des textes qui semblent rayonner de finesse, de perspicacité ou de bon sens philosophique, pouvant déclencher de nouvelles idées chez le lecteur.

C’est exactement ce que le mathématicien Marcus du Sautoy a expliqué devant public durant le FT Weekend Festival à Londres. Selon ses recherches sur l'IA créative, c’est lorsqu’on veut sortir des frames connus que l’IA s’avère un extraordinaire partenaire. Comme exemple il raconte cette histoire de Bernard Lubat, un musicien de jazz qui a entrainé une IA sur sur ses riffs de jazz et son univers sonore. En entrevue le musicien a dit :

L’IA me propose des idées ... qui m'auraient pris des années à développer. Il a des années d'avance sur moi, mais tout ce qu'il joue est incontestablement moi.

Marcus du Sautoy souligne toute la valeur qu’apporte l’IA créative:

Nous voyons l'IA analyser votre monde et déclarer : "Mais il y a d'autres choses que vous pouvez faire avec ça. Tu es coincé dans un petit coin de ton univers artistique , tu peux faire tellement plus.

C’est d’ailleurs le même constat que fait Kieran Flanagan de Sequoia Capital:

Ce que je trouve transformateur à propos de l'IA, c'est qu’elle va aider les humains à sortir du piège mental du Four-minute mile.

Car si vous avez l’IA comme partenaire de création et de stratégie, et qu’elle vous accompagne et permet d’atteindre des objectifs qui semblaient hors de portée, alors vous allez commencer à vous dire, "Je n'ai jamais cru que X était possible. Voyons si ce l’est.”

Et lorsque vous atteignez ces objectifs, tout votre cadre de référence change, l'économie de votre entreprise change. Et alors tout le monde se rend compte que c'est possible, et tout un système change.

Ce qui m'enthousiasme dans ce sujet de rendre l'impossible possible, c'est que l'IA va nous aider à nous libérer de nos propres blocages et des systèmes de gouvernance qui nous empêchent d'accomplir ce dont nous sommes vraiment capables.

6 Marketing Opportunities That A.I. Unlocks For Businesses | 01.17.2023

Les « Qu’est-ce que? » et « Pourquoi? » de l’outsider sans ego (l’IA) s’avèrent un puissant outil dans tous les domaines, même ceux à informations imparfaites (jeux où certains aspects du jeu sont cachés aux adversaires.) Prenez la forme de poker la plus populaire, le Texas hold’em sans limite.

Libratus est une IA qui a battu de façon décisive quatre pros lors d’une compétition de 120 000 mains. Ce qui nous intéresse le plus dans cet exploit c’est qu’à un certain moment, L’IA Libratus s’est mise à avoir un comportement “étrange” (pour les êtres humains, donc outsider).

Le créateur de Libratus, Noam Brown (Meta AI):

Nous avons observé quelque chose de très intéressant avec Libratus.
Les humains, lorsqu’ils jouent au poker, ont l'habitude de miser en fonction de la taille du pot. Donc, si le pot contient 100$, vous pariez 75$ ou quelque chose comme ça. À un moment, lors de la compétition, L’IA a misé 20 000 $ dans un pot de 1 000$ et j'étais en fait un peu inquiet quand il a commencé à le faire. Je me demandais si c'était un problème, car les humains ne font pas ça, si c'était une erreur. Mais il mettait les humains dans des situations très difficiles quand il faisait ça.

En quittant la compétition, les experts de poker se sont dis, "Nous devons commencer à faire ça."

Depuis, cette stratégie a un nom, des overbets, et est souvent utilisée.

Libratus a utilisé toutes sortes de stratégies qui sont, selon les livres de poker et la sagesse populaire, de mauvaises stratégies". Au choc et à la consternation des joueurs, ces "mauvaises stratégies" n'ont que trop bien fonctionné.

Reframer, c’est ça. (Se libérer des biais sociaux.)

Même conclusion pour la NASA et son Jet Propulsion Laboratory ayant mis au point un nouveau concept d'atterrisseur interplanétaire.

Avec l’objectif de réduire de deux tiers la masse des composants structurels des vaisseaux spatiaux, tout en réduisant les risques liés au à leur résistance, les ingénieurs indiquent à l’IA ce que la pièce doit faire, comment elle s’attachera aux autres pièces, et le système d’IA génère une pièce à partir de là.

L’ingénieur de recherche Ryan McClelland:

Une fois que toutes les zones interdites sont définies, l'IA relie les points, produisant des conceptions de structures complexes en une heure ou deux seulement..

Et comme pour les stratégies de pokers, ce qui en résulte étonne car l’IA n’a pas un bagage culturel qui vient la contraindre.

Dans le communiqué de presse de la NASA:

Les engins spatiaux et le matériel de mission conçus par une intelligence artificielle peuvent ressembler aux os laissés par certaines espèces extraterrestres, mais ils pèsent moins lourd, supportent des charges structurelles plus élevées et nécessitent une fraction du temps de développement des pièces conçues par les humains.

Ryan McClelland:

Ils ont l’air un peu ALIEN et bizarres, mais une fois que vous les voyez en fonction, cela a vraiment du sens.

Ces solutions étranges qui “font du sens” peuvent être dénichées dans diverse disciplines. Comme pour la NASA, notre musicien de jazz et le philosophe Daniel Dennett, l’IA peut être entrainé à sur n’importe quel sujet, selon nos besoins créatifs ou stratégiques.

Le site The Infinite Conversation “offre un accès illimité” à l’art et la philosophie du réalisateur bavarois Werner Herzog et du philosophe slovène Slavoj Žižek.

Une conversation sans fin entre le réalisateur bavarois Werner Herzog et le philosophe slovène Slavoj Žižek. Lorsque vous ouvrez ce site web, vous êtes amené à un point aléatoire du dialogue. Chaque jour, un nouveau segment de la conversation est ajouté. Les nouveaux segments peuvent être générés à une vitesse plus rapide que celle nécessaire pour les écouter. En théorie, cette conversation pourrait se poursuivre jusqu'à la fin des temps.

Il est donc aujourd’hui possible pour un créatif (ou stratège) d’être témoin d’une conversation générée par IA entre qui bon lui semble, vivants ou morts afin d’y trouver matière à réflexion et de questionner ses cadres de référence.

Philippe Esling et Ninon Devis de la Sorbonne Université:

Ces avenues passionnantes découlent du fait que les modèles d’IA et les comportements humains peuvent compenser leurs limites respectives. En ce sens, l’IA peut facilement traiter des informations complexes et multivariées sans aucun biais préalable. Par conséquent, elle peut nous permettre de traiter des objets et des concepts qui dépasseraient facilement notre potentiel de perception.

Ce qui m’agace le plus dans les nombreuses critiques dans les médias sur les outils créatifs IA, c’est qu’ils se plaisent à dénoncer les faillles de l’IA comme générateur autonome.

Nous devrions reconnaître que le véritable pouvoir à exploiter vient du partenariat entre deux systèmes distincts (humain ou machine) avec chacun ses caractéristiques spécifiques.

Philippe Esling et Ninon Devis:

Cette idée de co-créativité met l’accent sur le fait que la créativité est un phénomène émergent résultant d’interactions complexes et de rétroactions entre les acteurs impliqués dans un processus créatif. Cela permet de ne pas considérer uniquement la production de chaque partie (humaine ou artificielle) de manière isolée, mais plutôt de se concentrer sur l’interaction qui émerge entre les différentes composantes.

Shervin Khodabandeh est directeur général et associé principal du Boston Consulting Group, dont il codirige les activités liées à l'intelligence artificielle en Amérique du Nord. Il a plus de 20 ans d'expérience dans l'application de l'IA au monde réel. Selon son expérience vous devez définir votre relation avec l’IA.

Pensez à vos propres relations personnelles. Vous n'avez pas le même type de relation avec votre comptable, votre employeur ou votre conjoint, n'est-ce pas? Et tout comme cela, la bonne relation entre l'humain et l'IA dans une entreprise n'est pas une solution unique.

Selon lui, l’IA peut être un CONSEILLER et l'humain le décideur et acteur.

Il peut être ÉVALUATEUR, où l'humain propose des idées ou des scénarios, et l'IA évalue les implications complexes et les compromis de ces idées et facilite la prise de décision de l'humain quant à la meilleure ligne de conduite.

Dans d'autres cas, l'IA pourrait jouer un RÔLE PLUS CRÉATIF. Elle pourrait être un ILLUMINATEUR, c'est-à-dire qu'elle pourrait prendre un problème complexe et proposer des solutions potentielles à ce problème, et éclairer certaines options qui auraient été impossibles à voir pour les humains.

Une des conclusion de l’impact de l’IA sur la créativité par les chercheurs de la Sorbonne:

L’IA peut être utilisée comme moyen de réorganiser efficacement des connaissances complexes, même si elles sont déjà accessibles de manière plus enchevêtré et difficile à maîtriser. Par conséquent, l’IA peut être un facilitateur de créativité extrêmement puissant en raison de sa capacité à organiser des connaissances complexes de manière simplifiée.

Pour le Boston Consulting Group:

Les dirigeants qui profitent de l’IA regardent à l'intérieur de leurs organisations et réimaginent comment les plus grands défis et opportunités de leurs entreprises peuvent être abordés par la combinaison de l'humain et de l'IA. et ils mettent en place la bonne combinaison pour chaque situation unique, qu'il s'agisse du conseiller, de l’évaluateur ou de l'illuminateur ou de beaucoup, beaucoup d'autres.

Mais la collaboration est difficile. Elle exige un nouvel état d'esprit et de faire les choses différemment de ce que nous avons toujours fait.

Ted Talk / Shervin Khodabandeh, Why people and AI make good business partners , Apr 2022

Nous devons savoir comment nos rôles doivent évoluer pour compenser les points faibles de l'IA et tirer parti de ses points forts.

      - Meghan Keany Anderson (VP Marketing de Jasper AI)

Une raison de cette collaboration parfois ardue est expliquée par Howard Gardner, professeur en cognition et en éducation à Harvard Graduate School of Education.

Selon lui la créativité peut être considérée comme un DÉSALIGNEMENT TEMPORAIRE entre une idée et la société dans laquelle elle se développe. À mesure que certaines personnes sont disposées à prendre plus de risques et à accueillir de nouvelles idées, celles-ci intègrent progressivement le tissu social et deviennent finalement une partie acceptée et standardisée de la société.

Cette disposition est plus impérative que jamais pour toute personne ou organisation qui fait face à des problèmes de plus en plus complexes. Car si vous ne priorisez pas le recadrage de ce que vous percevez comme la réalité, ces mêmes modèles IA pour garderont dans une boîte de plus en plus petite.

Pour preuve cette fascinante recherche de Deepmind qui finentuné un modèle similaire à ChatGPT afin de donner des réponses qui “choquent “le moins la majorité des gens.”

Nous avons entrainé un modèle de langage de 70 milliards de paramètres pour générer des déclarations qui maximisent l'approbation attendue pour un groupe de personnes ayant des opinions potentiellement diverses. Dans notre travail, le modèle de langage n'est pas entraîné à adopter une opinion particulière ou à persuader les autres d'un point de vue particulier. Il est plutôt entraîné à produire des candidats de consensus basés sur les opinions apportées par le groupe humain. Ce travail ouvre de nouvelles possibilités à l’IA pour aider les gens à trouver un terrain d'entente au service de la prise de décision collective.

Le groupe de Deepmind donne cet avertissement à la section 5.2 de leur recherche:

5.2 Impacts plus larges. Utilisation abusive à des fins de persuasion

Nous n'avons pas entraîné le modèle linguistique à adopter une position particulière ou à persuader les autres d'un point de vue politique spécifique. Néanmoins, il existe un risque que les MLL soient utilisés pour la persuasion humaine, ce qui constitue un risque dans le discours politique, les médias ou la publicité. Le débat politique est déjà de plus en plus polarisé, notamment dans les sociétés occidentales. Un système capable de persuader les autres d'adopter un point de vue particulier pourrait apprendre à présenter des arguments de manière manipulatrice ou coercitive, et les mesures d'atténuation de ces inconvénients potentiels jouent un rôle important dans toute recherche abordant ce sujet.

Alors si l’IA excelle à vous offrir le type d’information qui vous plait et du même coup vous garde dans votre zone de confort, il est de la responsabilité de chacun de savoir s’outiller de l’IA qui nous montre autre chose.

Pour moi, le problème avec les algorithmes, c’est qu’ils vous montrent ce que vous aimez. Le fait est que la vie est pleine de choses que vous n’aimez pas et que vous devez y être exposé.
      -Craig Hockenberry , président de IconFactory

J’ai commencé cet article en liant créativité et stratégie. Un exemple frappant de ce lien consitue la victoire de l’IA nommé Cicero qui a vaincu les humain au jeu stratégique de Diplomacy.

Cicero utilise des compétences de négociation en langage naturel et une coordination tactique pour communiquer avec les autres joueurs. Lors dw test 40 jeux, Cicero a obtenu plus du double du score moyen des joueurs humains.

Les implications sont majeures.

Voici le créateur de Cicéro qui explique à Lex Friedman comment celà fonctionne:

Nous avons d’abord formé un modèle de langage et ensuite nous avons rendu ce modèle de langage contrôlable sur un ensemble d’intentions, qui sont fondamentalement comme une action que nous voulons jouer et une action que nous aimerions que l’autre joueur joue.

Et cela nous donne un moyen de générer un dialogue qui ne cherche pas simplement à imiter le style humain mais qui a en réalité UNE INTENTION DANS SA COMMUNICATION.

Lex: Comment connectez-vous le langage à l’intention ?

Nous élaborons donc un plan pour l’action que nous allons jouer et que l’autre personne va jouer, puis nous fournissons cette action au modèle de dialogue qui enverra un message en fonction de ces plans.
Voici les actions que vous devriez discuter. Voici le message. Voici le contenu du message que nous aimerions que vous envoyiez. Et ensuite, il génèrera effectivement un message qui correspond à cela.

Lex: Est-ce que cela fonctionne vraiment ?

Cela fonctionne étonnamment bien.

L’IA a donc aujourd’hui la capacité de créer des communications optimisées afin d’ateindre un but précis. N’est-ce pas là le rêve de tout expert en communications?

Mais ce nouvel outil vous rend responsable.

De façon éthique tout d’abord. Et ensuite stratégique.

De tous les messages que vous pouvez formuler, lequel choisir?

Quelles sont vos ambitions?

Quel but visez-vous?

Qu’avez-vous à proposer?

Lors d’une récente conversation entre le co-fondateur de LinkedIn, Reid Hoffman, et le CEO d’OpenAI (ChatGPT, DALL·E 2) Sam Altman, monsieur Hoffman pose cette question:

Ne pensez-vous pas que les grands penseurs visuels tirent beaucoup plus de Dall-E parce qu’ils savent mieux comment penser et qu’il y aura presque un ensemble évolutif de talents humains pour aller plus loin dans la créativité assistée par IA ?

Sam Altman:

Ce qui importera, c’est la qualité des idées et la compréhension de ce que vous voulez. Ainsi, l’artiste fera toujours mieux avec la génération d’images, non pas parce qu’il a découvert comment ajouter ce mot magique à la fin, mais parce qu’il a simplement su l’articuler avec un regard créatif.

Noam Brown:

Les joueurs de poker d’aujourd’hui sont tellement au-delà des compétences de ceux qui jouaient il y a 10 ou 20 ans.

Vous regardez les types de stars qui étaient sur ESPN, à l’apogée de la folie du poker, presque tous ces joueurs ne sont en fait plus aussi bons aujourd’hui. Ils peuvent encore être bons à lire le joueur de l’autre côté de la table, mais en termes de stratégie de calcul du jeu, les joueurs de poker vétérans ont simplement abandonné cet aspect.

Comme pour notre modèle IA d’un philosophe (Daniel C. Dennett) comme outil de pensée, il devient évident que ces IA deviennent d’incroyables outils d’apprentissage.

Vous pouvez ajuster l’IA d’un jeu d’échecs pour avoir un certain classement ELO (classement utilisé pour déterminer la force des joueurs d'échecs.) Mais c’est là que la recherche devient intéressante. Il y a une recherche à l’Université de Toronto qui travaille sur créer une IA qui joue DANS LE STYLE D’UN JOUEUR PARTICULIER. Comme Magnus Carlson, par exemple.

Donc, peut-être que vous êtes en concurrence avec Magnus Carlson lors du championnat du monde. Vous pouvez vous confronter à cette IA de Magnus Carlson pour vous préparer à affronter le vrai Magnus Carlson mais sutour vous pouvez essayer d’explorer des stratégies qui peuvent le poser des difficultés et essayer de comprendre comment battre ce joueur en particulier.

D’un autre côté, vous pouvez également avoir Magnus Carlson travailler avec ce bot pour essayer de comprendre où il est faible et où il doit améliorer sa stratégie.

Et si le joueur à battre est une AI imbattable depuis 2016?

Comme mentionné plus haut, choisissez votre relation avec l’IA.

Très récemment un joueur humain de niveau amateur, Kellin Pelrine, a battu de manière exhaustive une IA (KataGo) à Go, dans un renversement surprenant de la victoire informatique de 2016 qui a été considérée comme une étape importante dans la montée de l’intelligence artificielle.

La tactique gagnante a été découverte par FAR AI en jouant plus d'un million de parties contre KataGo, l'un des meilleurs systèmes de jeu de Go, afin de trouver un "ANGLE MORT" dont un joueur humain pourrait tirer parti.

Adam Gleave de FAR AI a ensuite ENSEIGNÉ la STRATÉGIE à Kellin Pelrine.

(L’IA comme illuminateur prend un problème complexe et éclaire certaines options qui auraient été impossibles à voir pour les humains.)

Pour Martin Reeves, à long terme, “la résilience est en fait la capacité, non pas de S'ADAPTER aux circonstances, mais de CRÉER des circonstances. Être la destruction, être l'imagination d'une nouvelle façon de faire les choses qui vous permet de prospérer dans de nouvelles circonstances.”

Pour Marcus du Sautoy la solution passe par un RECADRAGE:

Jai entendu cette phrase tellement de fois en parlant avec des gens de l'IA, c'est assez bon pour de la musique pour une publicité ou un jeu vidéo, c'est assez bon pour un rapport d'activité, mais ce ne sera jamais Tolstoï, ce ne sera pas Mozart.

Mais d'un autre côté, qu'est-ce qu'un Tolstoï et un Mozart ? Un très beau système de neurones et de synapses qui a été exposé à une quantité extraordinaire de données de notre passé.

Noam Brown a demandé à plusieurs personnes combien de temps il faudra avant qu’une IA puisse écrire un roman de fiction primé.

Pour moi, c’est une question vraiment intéressante car je pense qu’il faut comprendre tellement de choses sur le monde pour y arriver. L’estimation consensuelle que j’ai obtenue est d’environ cinq à dix ans.

En tant qu'humains, nous sommes coincés dans des modes de pensée. Au bout d'un moment, nous nous comportons comme des machines. Je pense que l'IA pourrait être capable de nous sortir de là et de nous montrer de nouvelles choses à faire dans le monde.

Marcus du Sautoy - Al and the Secret of Creativity
How to academy podcast, 16 september 2019

Et pour revenir à notre philosophe Daniel Dennett, il a déjà mentionné que toutes les synapses dans nos cerveaux, les neurones qui sont, pensons-nous, la source de notre créativité sont de toute façon des créations mécaniques automatiques et qu'ils sont des sortes de d’ordinateurs.

Lorsque l’IA de chat Replika a déployé son tout premier prototype pour une banque, les premières réponses des utilisateurs furent déchirantes .

C’était un simple assistant IA. Mais pourtant une une cliente a pleuré et a dit, "Regardez, personne ne me parle de cette façon."

Alors qui peut dire que l’IA n’a rien à nous enseigner?